Ce n’est pas le retour de deux super héros de la mer, mais un retour tout-court du Nos Limites à travers la mer d’Irlande puis de la Manche.
Nous ne pouvons pas quitter l’Irlande sans un dernier petit tour par sa côte Est, qui n’est à priori pas la plus sauvage ni la plus jolie (d’après les locaux), mais chacun trouve la beauté où il sait la chercher et, croyez nous, nous en avons eu plein les yeux. Plein les yeux de cette île magnifique, tapissée d’un splendide vert émeraude, qui ressort bien sous la grisaille que nous décrirons comme quasi permanente. Et plein le c** de la pluie et des dépressions qui semblent, comment dire ? AIMANTEES à l’île.
Heureusement, les dépressions d’Ouest ne lèvent pas de mer dans la mer d’Irlande ni dans le canal Saint George. La technicité est plus subtile et se joue au niveau des courants : 9 noeuds de moyenne, puis 2,5 puis 9…Rien ne dure, ni le sens des courants, ni le soleil.
Dun Laoghaire, bis
Nos pérégrinations dans notre ville refuge nous a révélé que les habitants adorent l’eau froide. Ils se baignent sans combinaison, quand nous n’osons même pas enlever notre coupe-vent, nous restons béats d’admiration. Un lieu mythique, le Forty foot, est une sorte de zone de mise à l’eau, avec rampes, escaliers, protections contre le vent, etc…où les amoureux de l’eau se plongent quelques minutes durant dans une eau à 14 degrés…nous nous contenterons de les observer, bien au chaud dans nos petit pulls.

Shankill
Les jambes nous démangent, et le duo rêve d’une randonnée champêtre entre deux jours de pluie. Armés de nos coupe-vent, chaussures de randonnée, pull, double pull, bonnet blanc, et blanc bonnet…nous décidons de visiter les « montagnes » Dublinoises. Montagnes est un bien grand mot pour qui est habitué au Mercantour, mais cela a été tellement dépaysant ! Le seul bout de terre de la région abritant une forêt (DONC un abri potentiel du vent, ndlr) est la petite ville côtière de Shankill (Seanchill, à prononcer cheun-chill) qui signifie vieille église. De vieille église nous n’en verrons point, à la rigueur un vieux château en ruine, mais privé donc interdit d’accès :(. D’ailleurs notre voisin de ponton, un pur local, nous apprend que tous les mots Irlandais comprenant Kill ou chill, intègrent donc « église » dans leur signification, ce qui, pour simplifier, représente au bas mot 94% des villes de la côte Est.
Néanmoins, la randonnée offre un belvédère magnifique à seulement 15 minutes de train de Dun Laoghaire, une bouffée d’air frais hors de la ville.

On peut y observer des choses incroyables, parmi celles-ci :
- les Irlandais ramassent les déjections de leur toutou même dans la forêt ! (oui !)
- le vent en haut d’une colline est augmenté de façon exponentielle même sur une petite hauteur, accrochez-vous !
- il peut pleuvoir et faire soleil en même temps, à raison de 16 fois par heure

Bercés dans la campagne irlandaise, puis le long d’un chemin où sont tagués d’étranges champignons (hallucinogènes ?) sur les murs, des restes de cartouches de gaz hilarant d’une taille gigantesque abandonnés dans les fourrés…on sent que de longues soirées peuvent se passer ici. Nous croisons quelques cavaliers dans la forêt en descendant, ainsi que de nombreux oiseaux curieux.



Le retour se fera évidemment sous la pluie, nécessitant un arrêt d’urgence au café le plus proche :).
Arklow et Rosslare
Deux mouillages ont ponctué notre route, d’une fort bonne tenue sous des rafales à 35 noeuds et sous la pluie ! Au passage, nous nous sommes rendus compte que l’étanchéité du NOS LIMITES n’était pas parfaite, rires !. C’est très sympa quand il commence à pleuvoir dans le bateau ! Au début nous étions dépités mais les dernières recherches avant de trouver la source nous laissaient plutôt pantois mais parfois hilares ! Comme dit un certain nombre de fois : si tu n’as qu’une emmerde par jour c’est que tout va bien ! Sortons les serpillères ! Cela nous a permis de nous ajuster et de régler le problème après environ 400 heures de recherche de la zone incriminée.
Arklow est un tout petit mouillage en face d’une carrière de pierres, pas franchement sexy dans la description, mais pourtant, un ponton abandonné à côté du bateau nous a donné un bien joli spectacle : des dizaines d’oiseaux de toutes espèces, cormorans, goélands, guillermots de Troïl, battant des ailes, se séchant, paradant ! Le racisme et l’exclusion n’existent pas chez les oiseaux.

Le truc à savoir pour ce mouillage, c’est que la vase du fond est recouverte d’une sorte de limon issu du travail de la pierre, et qui ressemble franchement à du ciment frais. Une bonne animation au moment de partir du mouillage avec 40 mètres de chaines recouvertes de la vase collante et épaisse, à arroser tous les mètres de seaux d’eau de mer et à brosser au balai. Heureusement, le départ s’est fait lors d’une accalmie qui nous a permis de faire notre ménage tranquillement (malheureusement pas de photographie disponible de cet évènement).
Une bien jolie navigation nous a attendu ensuite pour nous positionner au mouillage de Rosslare, ultime étape du canal St Georges, et attendre l’anticyclone, ou au moins un vent portant. Les 10 noeuds annoncés de face ont été évalués à 20/25 noeuds par notre anémomètre, le tout avec des courants d’abord favorables, puis ensuite évidemment, nettement moins favorables, et le mot est faible. Mais il fallait bien se protéger d’une énième dépression dans le mouillage de Rosslare, au sud extrême de l’Irlande, de très bonne tenue, avec la vision des gros ferrys qui débarquent les passagers de Cherbourg. Une pensée pour les Cherbourgeois qui vont en Irlande ou l’inverse…à mon avis la météo ne doit être très différente dans les deux régions, et à mon autre avis, il ne doit pas y avoir beaucoup de touristes…En vérité il y a bien plus de camions au mètre carré que de vans ou de campings car.

Kilmore Quay, une découverte adorable
Un petit port pour se reposer avant notre grande traversée vers l’Angleterre, puis la Normandie étant nécessaire, c’est Kilmore qui nous a séduits : un village de pêcheur, bien loin du standing de Dun Laoghaire, peuplé de gens sympathiques et accueillants. On y a aménagé un petit port de plaisance, avec le nécessaire, ce qui fut parfait pour l’équipage.
Accueil très sympa par notre maître de port, explications données détaillées, avec, en prime, un point météo commenté…le sourire, tout y est après une petite traversée tonique de la pointe de Rosslare; tellement tonique que le choc de la houle de face à déconnecté une connectique de l’anémomètre (l’entrée au port s’est donc faite au jugé et senti, même si on avait capté le sens du vent avant le problème, heureusement vite résolu). On est marins, ou on ne l’est pas, pas vrai ?

On vous avait parlé des shipchandlers pathétiques de la capitale ? Et bien ici, c’est la caverne d’Ali Baba. Le vendeur a tout, absolument tout. C’est le rêve pour capitaine Fabrice qui s’élance dans les rayons, raflant les câbles électriques, vis, boulons, cosses, gaines, colles, scotchs étanches, clés anglaises…comme un enfant lâché dans un magasin de bonbons, sans plus aucun contrôle. Cela dit, votre narratrice n’est pas en reste, puisqu’elle se fournit parallèlement en leurres pour la pêche, en fashion victime des petits poissons siliconnés, aux reflets multicolores.
Si toi, lecteur(trice), tu te demandes quel est le meilleur Pub de Kilmore, la réponse est simple : il n’y a qu’un seul pub, c’est donc le meilleur; ça c’est facile ! Des restaurants situés à quelques kilomètres du port se proposent de venir nous chercher et de nous ramener au bateau en voiture, c’est dire s’ils cherchent les clients 🙂
Cependant, la petite troupe a préféré marcher dignement sous une bruine délicate, en suivant la seule route de la ville, pour trouver le fameux pub. Particularité : le pub est exactement en face de l’Eglise (provocation ? simplification pour aller boire une pinte avant, pendant ou après la messe ?), toujours est-il que le contraste des deux bâtisses est saisissant.


L’ambiance ici est incroyable. Le premier jour sera un repas à heure anglaise (16h30 of course) accompagné d’une Guiness, dans un calme absolu. Le lendemain, samedi soir, l’ensemble du village semble réuni dans ce mouchoir de poche : enfants, parents, grands parents, pêcheurs, marins; tout le monde joue des coudes pour accrocher un tabouret contre un comptoir, le sourire aux lèvres, et la conversation facile.


La vie de plaisancier c’est aussi ça. Conversation avec le maître du port :
– Aidan, savez vous où on peut trouver du homard ?
Lui, montrant un bateau sur l’horizon.
– C’est lui le pêcheur, je l’appelle pour demander son tarif. Ok, il sera là dans une heure, 10 euros le homard.
Imaginez notre surprise quand, au lieu de le rejoindre sur son ponton, nous voyons le petit bateau de pêcheur se mettre à couple du Nos Limites pour nous vendre deux beaux homards, et nous offrir en prime 3 araignées de mer, cadeau, comme ça :).

Hélas, nous ne traînons pas, car, le lendemain, c’est le départ de l’Ile d’Emeraude, que nous quittons avec une nostalgie plus grande encore qu’à Dun Laoghaire.

Nous larguons les amarres sous un ciel radieux après une courte promenade sur la plage.






Répondre à kavekachris Annuler la réponse.