Saison 2, épisode 4 : From Finisterre to Finistère

Le bonheur est dans le pré des rias

De toutes les zones de navigations que nous avons expérimentées jusqu’à présent, aucune n’équivaut aux rias de la Galice. Il faut imaginer d’immenses bras de mer, s’étendant dans la profondeur des terres, parfois brumeuses, parfois ensoleillées, entourées de côtes rocheuses parsemées de sable fin. Le cadre est posé.

Nous avons découvert la ria de Vigo dans l’épisode précédent, qui n’était qu’un prélude aux suivantes. Plus on navigue vers le nord, plus les côtes deviennent sauvages et se dépeuplent, à la fois de touristes, et d’habitants.

Le fond du fond de la ria de Muros, le temps est suspendu, jamais de houle dans les rias, si on choisit la bonne !

Partis de Vigo, par une pétole digne de Méditerranée (encore celle-là!), nous passons le Cap Finisterre par 5 nœuds de vent, avec un bon courant de marée portant. Pour information, le cap Finisterre est la terreur des marins naviguant sur zone : courants forts, vents catabatiques, accélérations subites et imprévisibles et évidemment, une mer qui se lève bien vite. Normalement les orques ne sont pas sur zone donc l’équipage peut souffler, et se vautrer lamentablement dans le cockpit pendant que le moteur fait tout le boulot; c’est bon de pouvoir compter sur notre pilote automatique :). Par chance, une petite brise finit par se lever. Au moins notre spy asymétrique ne moisira pas dans son sac, faute d’être utilisé.

Cap Finisterre, il a l’air très mignon vu de loin

Parlons-en de ce spi…il est le plaisir absolu de la voile pour Fabrice, la quintessence de la glisse. Mais, pour Céline, il consiste surtout en longues minutes d’installations (souvent par vent faible et beaucoup beaucoup de houle à l’avant du bateau) : mettre les écoutes, sortir la voile, installer la chaussette, hisser, bloquer, puis lancer le monstre. Souvent, il est installé pour être utilisé 30 minutes maximum (le temps de sécher la voile !). Ainsi, calculons le temps nécessaire à une bonne session de spi (honte sur nous, nous ne sommes pas des rois de la régate !):

  • 30 minutes de négociation avant de la mettre en place plutôt que le génois
  • 30 minutes d’installation (on exagère toujours)
  • 30 minutes d’utilisation : ensuite le vent forcit ou tourne 🙂

En Méditerranée, compte tenu du vent, la négociation durait parfois le même temps que la bonne brise, voire plus longtemps, l’équipage se rendant compte que le vent avait déjà changé !

Le (petit) monstre, fougueux qui nous propulse à 7 noeuds

Revenons à l’aventure : nous passons donc finalement le Cap Finisterre sous spi, rentrant à toute berzingue (7 noeuds quand même) dans la ria de Camarinas, extrêmement bien protégée, salués par le sanctuaire de la Virxe da barca (sanctuaire de la vierge de la barque) posée sur une langue rocheuse au delà de la jolie ville de Muxia (prononcez Mouchia).

le sanctuaire des marins, la messe en live via les hauts-parleurs, nous voilà entre de bonnes mains 🙂
photo en caméra cachée de la messe, on prend au sérieux la protection des marins ici !

La ville va nous accueillir au son de la Gaïta, l’équivalent de la cornemuse en Galice, lors d’une fête de village en tenues traditionnelles.

A ce moment du récit, la narratrice se permet une remarque pertinente (comme d’habitude) : en Espagne, nous nous sentons chaque fois « chanceux » de tomber sur des fêtes ou des évènements MAIS ! En réalité, les Espagnols ont le sens de la fête; à tel point que la fête de la musique est une pure hérésie selon eux. Pourquoi fêter la musique un seul jour dans l’année ? rires ! Ils font la fiesta sans arrêt, augmentant nos chances d’en vivre une.

Le Nos Limites au fond qui attend sagement au mouillage de Muxia.

L’équipage, émerveillé par le calme de la petite ville de Muxia, a décidé d’aller plus loin et d’explorer Camariñas qui se situe dans le nord de la ria. Quelle erreur !!!! (vous remarquez les 4 points d’exclamations ci-dessus, cela aura son importance dans le récit).

Ancre posée, plage sauvage accessible uniquement par les bateaux, forêt dans l’arrière plan, calme absolu rompu seulement par les différents oiseaux selon l’heure et première nuit au calme absolu.

Le lendemain, l’équipage est tellement heureux qu’il décide de prolonger le plaisir. Nous sommes alors le 23 juin (dans le pays de la fête, vous vous souvenez !). Un petit concert commence sur la plage située à 800 mètres du Nos Limites vers 20 heures, sympathique et folklorique, presque cliché mais au demeurant agréable. A minuit, un magnifique feu de joie commence. Nous ne sommes pas en France et la législation sur les feux est plus hasardeuse : un immense feu de joie de 4 mètres de haut brûle sur la plage, directement à côté des festoyeurs, amusant. Passé le feu d’artifice, nous pensions être enfin en capacité de dormir, que nenni ! La fête, cette sal**perie de fiesta, a duré jusqu’à 7 heures du matin, avec des vibrations si puissantes que deux paires de boules quiès par oreille n’ont pas suffi à soulager nos peines. La fête de la Saint Jean nous laissera un souvenir mémorable, plus intense et fatigante que trois jours de quarts en mer.

Faux départ ?

Une consultation de la météo nous annonce bientôt un vent favorable pour rejoindre l’Irlande, quatre jours de portant, c’est presque trop beau pour y croire mais nous ne sommes pas pessimistes. Une nuit au port de Muxia (nous fuyons désormais Camariñas comme la peste) pour faire les pleins (surtout de jambon ibérique) et le 24 juin, le Nos Limites s’élance plein Nord, poussé par 20 nœuds de vent de SO, magnifique !

Les au revoir à la famille réalisés, le navire file, mer plate, conditions idéales. Idéales oui, pendant 20 milles nautiques. Puis, ce que nous avons pris pour le vent n’était qu’une brise thermique. En fait, le front de vent était bien plus rapide que nous et nous avons été devancés platement. Comme dirait un marin rencontré lors de notre périple : « Nous sommes baisés comme un chat sur une bouée de casier (de pêche). « 

Adieu donc les 4 jours de vent et de navigation Gaélique. Et là, vous nous direz que les marins sont superstitieux (et c’est vrai) mais deux éléments nous ont bien convaincu de regagner sagement la côte, trois en fait :

  1. bah, y’a plus de vent ! rires
  2. un papillon porte nouvelles venu à bord, est resté en extase devant notre écran de navigation, pointant pendant 10 secondes avec ses antennes la côte….si ce n’est pas un signe palsambleu !
  3. des dauphins nous ont suivis pendant 15 minutes vers la côte après notre changement de cap

Bon ok, le captain’ et moi même fonçons vers la Corogne, la plus grande ville de Galice, qui sera notre abri dans cette attente. L’arrivée de nuit dans la ria ne nécessite pas de phare (puisque celui-ci, à notre grande surprise, ne fonctionne pas), puisque les nombreux cargos et les éclairages publics dignes du stade de France nous guident (avec le GPS allumé quand même, l’équipage n’est pas fou et de toutes façons ces lumières l’aveugle ! rires).

La ville de Ares est toute désignée : calme, accessible, accueillante et à taille humaine (un excellent glacier complète le package). Nous vivons désormais totalement à l’heure espagnole : le soleil de couche à 23h30, se lève à 7 heures, soit 3 heures avant nous :). N’oublions pas la glace de 18h et le repas à 22h.

on fait le tour de la ville en 20 minutes, pas de bouchons, petits commerces et douceur de vivre

Le retour dans l’Hexagone va être difficile ! Ares, comme le dieu de la guerre; Ares est le Brest de la Galice, dans la petite ria de Ferrol, les gros bateaux militaires défilent, et les tirs d’artillerie sont audibles du mouillage, ambiance assurée entre deux concerts ou feu d’artifices. J’oubliais : personne, absolument personne, ne parle anglais. Nous allons rester 11 jours au mouillage ! Ce salaud d’anticyclone nous bloque au fond de la ria mais l’équipage en dilettante, tire profit de la vie au maximum.

la plage d’Ares, temps breton parfois mais mer à 22 degrés 🙂

Vrai départ ?

Une consultation rapide de la météo nous confirme la SEULE fenêtre pour traverser enfin ce sacré Golfe de Gascogne. La seule avant au moins encore 15 jours. Disons que c’est le moment où jamais, trois jours de vent parfait.

Nous levons l’ancre le matin du 5 juillet, direction la Bretagne, Fabrice rêve de Benodet ! Soit !

En levant l’ancre, nous retrouvons, accrochée à notre ancre via un paquet d’algues, une coquille saint jacques vivante. Un signe du destin (oh ils nous font encore le coup de la superstition !). Il n’empêche que ce symbole inattendu clôt le chapitre de Compostelle d’une très jolie façon, comme un cadeau de départ, confirmant « évidemment » que c’est le bon jour pour partir. rires.

Suite au prochain épisode.

2 réponses à « Saison 2, épisode 4 : From Finisterre to Finistère »

  1. Avatar de peacefully628f898e0c
    peacefully628f898e0c

    Si vous passez par la Bretagne, n’oubliez pas que nous sommes à Vannes.

    J’aime

  2. Avatar de peacefully628f898e0c
    peacefully628f898e0c

    si vous vous arrêtez en Bretagne n’oubliez pas que nous sommes à Vannes.

    J’aime

Répondre à peacefully628f898e0c Annuler la réponse.